UN GOUVERNEMENT SANS EPINE DORSALE

Ahmed Charai

Les accidents de communication sont nombreux. On se souvient tous de Sidi Ifni et la ridicule empoignade entre le Premier ministre et une chaîne de télévision publique. Mais sur des dossiers plus simples, où il n’y a aucune intervention de forces occultes, réelles ou supposées, cela n’a pas été brillant non plus. En répétant, comme des simplets, que le Maroc n’avait rien à craindre de la crise, les ministres n’étaient pas crédibles. Ils sont aujourd’hui, pour les plus concernés, en train de préparer des plans d’urgence, comme celui du tourisme déjà annoncé.

Le code de la route, nécessaire et si urgent face à la guerre des routes, est combattu par une majorité très faible face aux lobbies, sans que la primature joue son rôle de soutien à son ministre. Les autres départements sont en proie à des problèmes internes gravissimes sans pour autant que le cabinet El Fassi ne réagisse de manière politiquement responsable.

Enfin, alors que la crise mondiale a changé de forme et de nature, que les cours des matières premières s’effondrent, que les périls sont ailleurs que sur la Caisse de compensation, le gouvernement accorde des augmentations de prix sur les produits de nécessité aux lobbies.

Incompréhensible, parce que les syndicats dénoncent une tension sociale et que tous préparent leurs troupes aux grèves et que dans des secteurs tels que la santé, la justice, les collectivités locales, la grogne est effective.

Problème génétique

Pourquoi est-ce que ce gouvernement est peu respecté, voire écouté par l’opinion, et qu’il passe à travers ce qu’il entreprend ? La seule explication est politique. Il est peu homogène, parce qu’il s’agit d’individualités agglomérées par des centres de pouvoir distincts. Il n’est pas politiquement responsable parce que les partis ont vu ces individualités leur être imposées. Abbas El Fassi, ayant accepté le fait accompli, n’a aucune sorte de leadership sur ses troupes. La fonction s’en trouve dévalorisée, ce qui rejaillit sur l’action de tout le gouvernement.

Enfin, les acquis des cabinets précédents ne représentent pas un matelas sur lequel peut s’endormir l’actuelle équipe. Il n’y a pas de grands travaux à lancer, Ceux qui le seront sont prévus depuis des années. La croissance s’essouffle, et la vie est toujours plus difficile pour le plus grand nombre.

On attendait de la ‘’ démarche démocratique ‘’ qu’elle aboutisse à un changement qualitatif : la lutte contre la corruption, la transparence, la méritocratie, l’élargissement du champ des libertés, la reforme de l’éducation, de la justice, de la santé publique. A part quelques actes concrets, la machine n’est pas encore huilée.

Le Maroc est à quelques mois du renouvellement des conseils communaux. C’est une échéance cruciale à deux niveaux. D’abord, si la qualité des conseils n’évolue pas, c’est la gabegie, avec son coût énorme qui va se perpétuer. Ensuite, il faut absolument atteindre un taux de participation conséquent, sinon on affaiblit encore plus la démocratie. Un gouvernement politique, doit s’employer à avoir une image mobilisatrice, en vue de réussir les élections et de les gagner. Il faut utiliser les prochaines semaines dans ce sens.

Le gouvernement El Fassi le peut-il ?

Hausse des prix, on n’est pas sorti de l’auberge

Said El Hadini

Jeudi 1er janvier 2009, la société de transport urbain à Casablanca, M’dina Bus, augmente ses tarifs. Une hausse qui fait suite à celles, plus récentes, du lait et du ciment. Décidément le feuilleton de la hausse des prix, entamé depuis le milieu de l’année 2006, ne semble pas prêt de s’estomper. En 2008, le taux d’inflation aura avoisiné les 4%, contre 2% une année auparavant. Un niveau jamais atteint depuis treize ans. Conséquence directe, c’est le pouvoir d’achat des citoyens qui en prend un sérieux coup. Pour les produits alimentaires qui absorbent plus de 40% du budget des ménages, les hausses les plus significatives ont concerné les pâtes alimentaires (+27%), le couscous (+34,9%), l’huile d’arachide (+41,4%), la semoule (+41,7%) et le beurre industriel (+25,4%).

La baisse de l’IR, décidée pour préserver le pouvoir d’achat des consommateurs, n’est pas pour arranger considérablement les choses, particulièrement pour les bas salaires. D’autant plus que certaines entreprises, peu transparentes et mal structurées, cherchent à faire profiter leurs trésoreries de cette baisse plutôt qu’à la répercuter sur les salaires de leurs employés (particulièrement dans le cas où les contrats mentionnent des salaires nets et non bruts).

La cherté de la vie a donné lieu, tout au long des deux dernières années, à une kyrielle de manifestations, marches de protestations et autres sit – in, dont la plus spectaculaire fut celle de Sefrou en septembre 2007. Ce qui avait ravivé le spectre des fameuses émeutes de 1981 à Casablanca.

Comparé à d’autres pays à niveau de développement similaire, le taux d’inflation au Maroc est resté cependant contenu dans des proportions acceptables. La Jordanie affiche un taux de 16%, l’Egypte 20%, la Turquie 10,9% et la Tunisie 4,7%. «Sans l’intervention de la Caisse de Compensation, le taux d’inflation aurait pu atteindre 7%», se targuait Nizar Baraka, ministre en charge des Affaires économiques et générales du gouvernement. «Les mesures prises (par les autorités marocaines) à l’effet de maîtriser les prix intérieurs –– le subventionnement des produits alimentaires et des carburants, la suppression provisoire des droits de douane sur les céréales, et les actions de lutte contre la spéculation –– ont permis de maintenir l’inflation générale à un niveau relativement bas. Il reste toutefois que le niveau des subventions a triplé en deux ans, atteignant près de 6 % du PIB en 2008», souligne un rapport de la Banque mondiale, paru récemment, sur les perspectives pour l’économie mondiale en 2009.

En 2008, le montant alloué à la Caisse de Compensation s’est élevé à 36 Mds Dh. «Bien que la forte dépendance à l’égard de la subvention des carburants et des denrées alimentaires permette de limiter les pressions inflationnistes, le coût budgétaire à payer en retour reste très élevé», constate le rapport de la Banque mondiale. «En raison d’une mauvaise affectation des fonds, seuls 20 % de ces dépenses supplémentaires ont atteint les plus pauvres», ajoutent les auteurs du rapport, en allusion aux pays de la région MENA.

Inflation importée ?

Les autorités monétaires marocaines n’ont eu de cesse de rappeler que la hausse des prix serait plutôt liée à une inflation importée, consécutive au renchérissement des cours des produits importés, particulièrement du pétrole et des produits agricoles et alimentaires. Ces derniers, qui ont doublé entre 2006 et 2008 passant de 20 à 40 Mds DH, ont vu leur part dans le total des importations passer de 10% en 2006 à plus de 13% en 2008. L’indice FAO des prix des produits alimentaires est passé de 139 à 219 entre février 2007 et février 2008, soit +57,6%. Le prix du blé sur le marché international a doublé entre ces deux dates. Les prix des céréales ont augmenté de 84,9% et le soja a atteint son prix le plus élevé depuis 34 ans en décembre 2007, alors que le prix du riz a atteint son niveau le plus élevé depuis dix ans.

A la Direction de la statistique, on estime qu’une série de facteurs a entrainé cette flambée des prix des produits alimentaires. Il s’agit, entre autres, de la hausse de la demande émanant des pays émergents, du faible niveau des stocks des céréales (depuis 1982), de la hausse des cours du pétrole, de la réduction des surfaces cultivées et de la spéculation. Sans oublier que 100 millions de tonnes de céréales, et notamment le maïs, sont consacrées à la production de biocarburants -éthanol- notamment aux Etats-Unis, au Brésil et dans les pays de l’UE.

«L’inflation est importée à hauteur de 80% depuis 2006, mais avant cette date elle ne l’a pas été», estime Najib Boulif, économiste. Il rappelle au passage que la baisse de l’IR ne profitera point aux salariés de moins de 3000 DH. «Ils ne pourront pas suivre cette hausse vertigineuse des prix, qui ont doublé en un an. Il faut parallèlement mettre des garde fous pour contrecarrer les effets de la spéculation et œuvrer pour l’émergence de véritables associations de protection des consommateurs», souligne-t-il.

Détente

Le recul des prix du baril de pétrole (de 150 dollars au début du mois de juillet dernier à près de 40 dollars à fin 2008) et la détente constatée sur les cours des produits alimentaires, conjugués à une campagne agricole exceptionnelle cette année, permettent d’espérer un soulagement des tensions inflationnistes. Selon la Banque mondiale «les prix du pétrole devraient se situer en moyenne à 75 dollars le baril alors que ceux des denrées alimentaires devraient baisser de 23 % par rapport à leur moyenne de 2008.» Dans cette perspective, Bank Al Maghrib estime que le taux d’inflation en 2009 ne saurait dépasser les 3%. «Pour les économies importatrices de pétrole, la baisse des prix de l’énergie réduira leurs dépenses d’importation et leur permettra quelque peu de souffler face aux pressions inflationnistes liées à l’explosion des prix dans la première moitié de l’année 2008», note le rapport de la BM. N’empêche que des incertitudes demeurent, notamment l’évolution future des cours du pétrole. Autre facteur de risque, «l’éventualité de remous au sein de la population, face aux conditions potentiellement difficiles que créerait une récession économique mondiale».

A quand la sécurité alimentaire ?

Pour certains produits alimentaires, le Maroc assure l’autosuffisance (légumes et fruits frais, légumes secs, viandes et poissons frais). D’autres produits sont appelés à se développer dans le cadre du plan Maroc Vert. C’est le cas notamment des plantes sucrières et oléagineuses, et du lait… En ce qui concerne les céréales, la campagne 2007-2008 a enregistré une production insuffisante (25 millions qx contre 92 Mqx une année auparavant), d’où le recours à l’importation qui a connu une hausse de 78%, à 62 Mqx par rapport à 2006, avec un prix moyen plus cher de 49,8%. A fin novembre 2008, les importations de céréales ont totalisé 15,6 Mds DH, dont 11 Mds pour le blé. Autre produit de base importé, les huiles alimentaires. Les importations en graines et fruits oléagineux ont totalisé 538.000 tonnes pour une valeur de 1,7 Mdx DH (+31,8% par rapport à 2006). Dans la foulée, les importations des huiles végétales brutes se chiffrent à 428.000 T (-2,2%) pour une valeur de près de 3 Mds DH (+36,6%). Pour le sucre, 58% du sucre raffiné (1 million T) est produit à partir du sucre brut importé, qui a totalisé 2 Mds DH à fin novembre.

La hausse des prix est bel et bien terminée

La forte baisse des prix du pétrole et des produits alimentaires enregistrée récemment marque la fin de la hausse la plus importante qu’aient connue les prix des produits de base au cours des cent dernières années. Comme les précédentes, cette flambée des prix avait pour moteur la forte croissance de l’économie mondiale et s’est terminé avec son ralentissement, précipité par la crise financière. La durée exceptionnelle (cinq ans) de cette explosion des prix des produits de base, le nombre des produits concernés et les sommets atteints par les prix reflètent la vigueur de la croissance des pays en développement durant cette période. Entre début 2003 et mi-2008, les prix du pétrole (exprimés en dollars) ont grimpé de 320 %, tandis que les prix des produits alimentaires sur le marché international ont augmenté de 138 %. Mais la longue période de hausse est bel et bien terminée, même si l’on ressent encore les conséquences humaines et sociales de cette augmentation exceptionnelle des prix. Ces derniers connaissent une baisse générale, due au ralentissement de la croissance du PIB, à l’augmentation de l’offre et de la révision des prévisions. Les prix restent cependant beaucoup plus élevés qu’ils ne l’étaient au début de cette période de hausse. Ils devraient d’ailleurs demeurer plus élevés que durant les années 90 au cours des 20 années à venir, du fait de la demande de céréales, liée à l’utilisation des biocarburants. Le prix du baril de pétrole devrait se situer autour de 75 dollars l’année prochaine et, durant les cinq prochaines années, les prix réels des aliments dans le monde devraient demeurer supérieurs de 25 % aux prix en vigueur dans les années 90.

Source : Rapport de la Banque mondiale sur les perspectives de l’économie mondiale

Des hausses, des camarades et un citoyen

Salaheddine Lemaizi

Lundi 5 janvier, local du PADS (Parti de l’avant-garde démocratique socialiste) à Casa. Dans ce petit appartement de la place Maréchal, les membres du secrétariat de la coordination contre la hausse des prix et la dégradation des services publics se réunissent afin de «décider des actions à venir pour riposter contre les dernières hausses dans les prix du transport urbain et de certains produits de base». L’année 2009 commence chaudement pour ces militants, déjà chauffés à blanc après la manif du dimanche pour la Palestine

«Alors qu’il y a un échec au niveau du dialogue social et pas d’augmentations significatives des salaires, le gouvernement se permet de telles hausses ; ce sont des décisions anti-citoyennes», s’indigne Abdelhamid Amine, vice-président de l’AMDH et un des initiateurs des Coordinations. «On note que le gouvernement a appliqué ces hausses en cette période où la population est préoccupée par la situation à Gaza. Le citoyen a été pris de court par ces augmentations mais ces hausses ne passeront pas», jure-t-il.

Ce discours ne peut cacher la situation de léthargie que vit cette structure. «Les actions des Coordinations ont été freinées à cause d’un débat interne qu’ont eu les composantes de cette coordination pour défendre l’ensemble des droits sociaux, économiques et culturels», admet Amine. Mais l’immobilisme actuel est dû surtout à quelques dissensions entre les composantes des coordinations. «La 4e rencontre nationale a très mal tourné, ce qui a créé des divisions entre les membres et un blocage des activités», confirme Mohamed Abounasr, membre du secrétariat de la coordination de Casa. Il annonce l’organisation de conférences et de sit-in dans les prochaines semaines pour dénoncer les hausses. Mais d’où vient l’idée de créer ces Coordinations? Un zoom sur les réussites et les échecs des fameuses coordinations contre la hausse des prix est plus que nécessaire.

Flash back

Septembre 2006, l’AMDH, en la personne de son président de l’époque Abdelhamid Amine, lance l’idée de créer des coordinations contre la hausse des prix. L’appel a été lancé à «toutes les forces progressistes et démocratiques». Donc, d’entrée de jeu les islamistes étaient persona non grata dans ces coordinations. Ces fameuses «tansikiayate» comptaient des partis de la gauche radicale (la Voie démocratique, le PADS, le CNI, le PSU) plusieurs associations de la société civile (AMDH, ATTAC, Resaq, etc). Après plus de trois ans sur leur d’existence, Amine dresse un bilan de cette expérience qu’on disait unique au départ. «Le bilan est relativement positif, d’une certaine manière on a pu stopper les hausses des prix. Il faut imaginer la situation s’il n’y avait pas eu de protestations, car le gouvernement avait vraiment l’intention de se débarrasser de la caisse de compensation et c’est l’activisme des quelque 80 coordinations au Maroc qui a fait que le gouvernement réfléchisse à deux fois avant de prendre une décision dans ce sens. Le maintien donc de cette caisse est en soi un succès».

Cette structure a repris la place des syndicats ? «Il n’y pas eu de directives globales au niveau des dirigeants des centrales syndicales pour une implication dans le mouvement contre la hausse des prix», reconnaît Amine. «C’est surtout la société civile qui est en charge de ce mouvement. Ceci dit on ne veut se substituer à personne mais il fallait agir» ajoute-t-il.

Quantitativement, la population n’a pas répondu présente aux sit-in contre la hausse des prix en grand nombre, Même chose pour les deux marches nationales. La première marche nationale contre la cherté de la vie le 24 décembre 2006 à Rabat a mobilisé 3000 manifestants seulement. La deuxième marche était prévue le 23 mars 2007 à Casa – date symbolique en référence aux émeutes de 1965- mais les autorités l’ont interdite.

La date marquante dans la lutte contre la hausse des prix reste le dimanche 23 septembre 2007, avec l’émeute dans la ville de Séfrou. Un sit-in organisé par la Coordination locale a viré à l’émeute. Bilan : 270 blessés et 35 arrêtés dont des mineurs. Après ces émeutes, le ministre de l’Intérieur himself reçoit les responsables des partis politiques actifs dans les Coordinations pour leur demander de calmer le jeu, surtout que le Maroc traversait une vacance dans l’Exécutif. A l’époque les tractations pour former le gouvernement El Fassi étaient encore en cours.

Pour certains membres des Coordinations, «cette structure n’a pas su jouer son vrai rôle, on n’a pas fait des actions de proximité pour attirer les gens vers nous, nos actions sont restées loin des premiers concernés», nous confie un membre de la coordination de Casa.

Loin de ces débats de stratégies entre camarades, le citoyen lambda semble encaisser les dernières hausses avec résignation. Dans un arrêt de bus, des femmes assises sur un banc, ne trouvent rien à dire à ce sujet, l’une d’elles lance : «on paye le ticket du bus à 4 DH et on n’a pas d’autre choix». Dans un autre arrêt, Tarik, étudiant, ne cache pas son mécontentement mais commente la hausse du ticket avec ironie, «je trouve notre gouvernement peu convainquant. On nous dit que le Maroc est épargné par la crise financière alors que les prix flambent, il faut qu’il cherche un argumentaire solide pour nous convaincre». D’ici là, Tarik devrait payer 50 centimes de plus pour le ticket du bus, 20 centimes de plus pour le litre de lait. Santé.

Les ratés politiques de Si Abbas

Mohamed Semlali

De mémoire de Marocain, on n’a jamais vu un Premier ministre aussi chahuté que l’est Abbas Al Fassi depuis sa nomination il y a plus d’une année. Il faut dire que le leader de l’Istiqlal ne fait rien pour arranger sa situation. Le monsieur qu’on pensait un habile politicien doublé d’un communicateur adroit s’est révélé un peu limité dans les deux exercices. Ainsi, l‘opinion publique nationale a toujours à l’esprit les dénégations puérils du Premiers ministre lors des événements de Sidi Ifni. Elle se rappelle également, et de quelle manière, que le chef du gouvernement n’était pas au courant des dernières hausses des carburants à la pompe.

Les bourdes politiques du Premier ministre se multiplient ainsi que ses absences. L’image renvoyée du fonctionnement de l’équipe gouvernementale est tout simplement désastreuse. Un des cadors de l’Istiqlal qui a déjà occupé par le passé des responsabilités ministérielles n’hésite pas à dire : « nous avons l’impression que rien n’intéresse plus Abbas El Fassi. Rien ne le passionne. Comme si son unique objectif était de devenir premier ministre et c’est tout ». Une réalité indiscutable que même les ministres du gendre de Allal El Fassi ne peuvent plus cacher. La goûte qui a fait déborder le vase est la gestion du remplacement du gasoil 350 par le 50 PPM. Un dossier que gère le gouvernement depuis plusieurs mois et qui aurait dû bien se passer. Seulement, voilà, le premier janvier, plusieurs stations d’essence n’étaient pas approvisionnées en carburant avaient du mal à définir un prix. Le tout devant un silence étrange et gêné des principaux ministres concernés.

Les alliés au sein du gouvernement ne cachent plus leur exaspération. «La faiblesse du gouvernement et de son supposé maestro n’arrange personne. Si historiquement le palais se méfie d’un Premier ministre fort et populaire, cela ne veut pas dire pour autant qu’il s’accommode longtemps d’un chef d’équipe impopulaire et très effacé», avoue sous le coup de l’anonymat l’un des anciens conseillers de Abderrrahmane Youssoufi. Ce n’est pas pour autant que l’idée d’un changement de Premier ministre devient crédible.

Sur un autre registre où habituellement Abbas El Fassi tirait son épingle du jeu, celui-ci n’arrive pas non plus à s’imposer. En effet, le prochain congrès de l’Istiqlal pose plus de problèmes qu’il n’en résout. Si un troisième mandat est acquis pour le secrétaire général du vieux parti, cela ne se passera pas sans encombres. Plusieurs dirigeants et pas n’importe lesquels voient d’un mauvais œil cette «mascarade de congrès» que l’Istiqlal s’apprête à commettre. Le parti perdra certainement en termes d’image et de crédibilité. D’ailleurs, les militants istiqlaliens n’en reviennent toujours pas de l’attentisme de leur chef face aux violentes charges «mesquines et sans retenue» échangées par deux principales figures du syndicalisme istiqlalien. «Ce qui a le plus étonné, ce n’est pas tant la vulgarité des propos, que le silence ahurissant du leader de l’Istiqlal» observe un istiqlalien pur jus. Il est clair qu’au sein de la formation nationaliste, on est plus habitué aux échanges feutrés et aux formules polies, même si les intentions sont tout autant assassines. Mais c’est dans le domaine de la communication que Abbas El Fassi a un comportement lamentable. L’image qui s’est ancrée chez la presse et à travers elle chez l’opinion publique est celle d’un Premier ministre las, fatigué et qui traîne le pied. Quatorze mois durant, Abbas El Fassi n’a pas pu changer cette image, accréditant l’idée d’un homme croulant sous les responsabilités et peu préparé à les assumer. Et si l’on cumule tout cela au manque d’anticipation, à l’absence de réactivité et à une carence charismatique dont il a fait preuve, nous aboutirons à un gâchis politique.