Caricatures de Mahomet : le directeur de la rédaction de » France Soir » renvoyé

La décision n’aura pas traîné. Le jour męme de la reproduction dans les pages de France Soir des 12 caricatures représentant Mahomet – ŕ l’origine déjŕ d’un important controverse au Danemark –, le propriétaire du quotidien, l’homme d’affaires franco-égyptien, Raymond Lakah, a renvoyé, mercredi 1er février au soir, son directeur de la publication, Jacques Lefranc, nommé en septembre 2005 ŕ la tęte du quotidien.

Dans un communiqué, M. Lakah, patron de Montaigne Press, société qui détient la majorité de Presse Alliance (éditrice de France Soir), indique avoir « décidé de révoquer Monsieur Jacques Lefranc de sa fonction de président et directeur de la publication en signe fort de respect des croyances et des convictions intimes de chaque individu ». « Nous présentons nos regrets auprčs de la communauté musulmane et de toutes personnes ayant été choquées ou indignées par cette parution », ajoute-t-il. « Monsieur Eric Fauveau, directeur général de Presse Alliance, assurera en intérim les fonctions de président et directeur de la publication », poursuit le communiqué.

Seul journal français ŕ avoir publié ces caricatures, reproduction de celles du journal danois Jyllands-Posten, avec en titre de « une » : « Oui, on a le droit de caricaturer Dieu », le quotidien précisait mercredi en éditorial qu' »il n’y a dans les dessins incriminés aucune intention raciste, aucune volonté de dénigrement d’une communauté en tant que telle ».

Dans son édition du jeudi 2 février, France Soir revient sur la polémique suscitée par la reproduction de ces dessins. Il y défend le droit de la presse ŕ railler n’importe quelle croyance religieuse. Dčs sa « une », France Soir clame : « Au secours Voltaire, ils sont devenus fous ! » au-dessus d’une photo montrant trois hommes brűlant un drapeau danois. Dans ses pages intérieures, le quotidien s’interroge : « Intolérance religieuse ou laďcité ? » et explique son choix dans un encadré intitulé: « Réponses ŕ quelques questions. » Puisque « l’Islam interdit ŕ ses fidčles toute représentation du Prophčte (…), la question qui se pose est la suivante : tous ceux qui ne sont pas musulmans sont-ils tenus de se conformer ŕ cet interdit ? » « Imagine-t-on une société oů l’on additionnerait les interdits des différents cultes ? Que resterait-il de la liberté de penser, de parler et męme d’aller et venir ? Ces sociétés-lŕ, nous les connaissons trop bien. C’est par exemple l’Iran des mollahs. Mais c’était hier la France de l’Inquisition, des bűchers, de la Saint-Barthélemy » [massacre des protestants en 1572], assure le journal.

« La liberté religieuse, c’est la liberté de croire ou de ne pas croire, de pratiquer un culte en toute quiétude. Mais jamais elle ne saurait se transformer en liberté d’imposer ŕ toute la société les rčgles relevant d’une seule conviction », affirme encore le quotidien qui promet ŕ ses lecteurs de continuer ŕ user de la liberté d’expression, « au nom de la République et de ses valeurs ». Par contre, France Soir, qui reproduit également des illustrations qui ont choqué les églises chrétiennes dans le passé, ne mentionne ŕ aucun moment les changements dans sa direction.

France Soir, qui fut dans les années 1960 le premier quotidien français avec un tirage de prčs de 1,3 million d’exemplaires, est placé depuis octobre 2005 en redressement judicaire et cherche des repreneurs. Son tirage quotidien est tombé ŕ 45 000 exemplaires.