Businesswomen – Aiguillez vos talons

Les femmes représentent 50% de l’effectif des étudiants dans nos universités. Cependant, seulement 15 % d’entre elles (une femme sur sept) prennent le risque de se mettre à leur compte dès la fin de leurs études. Pis encore, en milieu urbain, on trouve 900.000 femmes actives et en milieu rural, on trouve 2.400.000 femmes actives. Elles sont présentes dans les secteurs du bâtiment, des travaux publics… Alors que le nombre de femmes entrepreneures possédant ou dirigeant des sociétés dans les différents secteurs de l’activité économique est estimé à 5.000. Un chiffre qui représente environ 0,5% de leur emploi dans le secteur formel et environ 10% du nombre total des entreprises. C’est peu… très peu. La situation de l’entrepreneuriat féminin, encore, timide se confirme à travers les chiffres publiés par l’OMPIC. Selon cette source, environ 1.700 certificats négatifs ont été octroyés à des femmes porteuses de projets en 2007 et 2.500 autres en 2008. Bien qu’il est difficile de vérifier si ces projets d’entreprises ont été concrétisés ou non, l’entrepreneuriat féminin est un fait. De plus en plus de femmes se lancent dans la création d’entreprises. Mais l’entrepreneuriat féminin est loin de constituer un poids au niveau de l’économie nationale. Pourquoi ? Pour répondre à cette question, il faut zoomer sur la réalité. Femmes et chefs d’entreprise actives, qui sont-elles ? Dans quels secteurs opèrent-elles?… En l’absence d’enquête réalisée par des instances publiques, l’Association des femmes entrepreneures du Maroc (AFEM) a confié cette mission à LMS. D’après cette enquête qui a porté sur 128 femmes chefs d’entreprise, 63% des femmes opèrent dans le secteur du service, 14% dans le commerce, 12% dans les BTP, 9% dans l’industrie et 2% dans l’agro-industrie. Les entités créées par les femmes sont dans leur majeure partie des PME. Du fait que les services sont le domaine de prédilection des femmes entrepreneures, les salaires tirent vers le bas et ne dépassent guère les 20.000 DH, souligne Younes Marhraoui, directeur Etudes, industrie, média à LMS. Quant à M. Charifi (Fondation Banque Populaire), il corrobore ces dires en déclarant que la taille des entreprises et le choix des secteurs expliquent la faiblesse du revenu des créatrices et dirigeantes d’entreprise. Les mots sont lâchés. La taille et la nature de l’activité. Le choix de ces variables atteste que l’esprit de risque chez la femme entrepreneure marocaine est timide. Pourquoi ce recul ?

Silence, on entreprend

D’après M. Charifi, il est désormais facile pour les femmes de monter des entreprises. Le problème n’est plus un problème de sexe féminin. Ceci est dépassé. Les contraintes rencontrées par l’homme créateur sont les mêmes que celles pour la femme. Ces contraintes sont majoritairement d’ordre administratif et financier (accès au financement) sans oublier le manque d’orientation et d’accompagnement. Au moment où certaines entrepreneures souhaitent l’instauration d’un code d’investissement spécifique à la femme, Souraya Badraoui, présidente de l’AFEM, confirme l’opinion de notre interlocuteur de la Fondation Banque Populaire. Elle déclare qu’elle n’est pas féministe et que l’amélioration des affaires devrait profiter à tous les porteurs de projets ou entrepreneurs, quel que soit leur sexe. Ainsi, le débat tourne autour d’un axe pas moins important que l’environnement des affaires et ses contraintes.

Comment attirer les femmes vers le monde du business ?

Pour la présidente de l’AFEM, communiquer autour des projets menés par des femmes ayant réussi leur acte d’entreprendre est très important pour y intéresser les femmes. A ce niveau, les acteurs responsables de la promotion de l’investissement manquent à leur mission. Comment communiquer autour des réussites alors que, jusqu’à présent, il n’existe pas de statistiques permettant de cerner l’entrepreneuriat au féminin et de nature à faciliter la mise en place d’un dispositif adéquat pour encourager les initiatives et consolider l’existant. En dépit de l’enquête réalisée par l’AFEM, aucune autorité publique ne s’est intéressée à la question (identifier et recenser l’ensemble des femmes chefs d’entreprise dans les 16 régions du Maroc ; cerner le profil des femmes chefs d’entreprise ; identifier et évaluer les difficultés vécues dans la création ou la gestion de leur entreprise ; apprécier les attentes et les besoins au niveau économique, législatif, juridique et social et rechercher les moyens d’incitation à la création). Cependant, le Maroc dispose de 16 régions où des femmes opèrent dans un silence complet. Cette réalité désolante explique le faible niveau de partenariat dans le monde des affaires au féminin. Le deuxième point handicapant l’entrepreneuriat au Maroc évoqué par S. Badraoui est l’absence de l’accompagnement, surtout en phase de création. Plusieurs projets n’ont pas vu le jour, faute d’une étude de faisabilité et de viabilité. Nos jeunes femmes ayant un fort potentiel d’entreprendre échouent à la phase de montage du dossier à présenter au banquier. Et si on crée des cellules d’information et d’accompagnement dans nos universités, la donne ne serait-elle pas inversée ? Il semble que la communication et l’information s’avèrent des impératifs, même après le lancement. Nos femmes entrepreneures gèrent, dans leur majeure partie, des PME. Pour s’offrir une stratégie interstitielle, l’information et la communication s’imposent. Ces deux dernières variables renforcent le professionnalisme des chefs d’entreprise.